Livret statistique du Conseil National des Évangéliques de France

Soucieux de rendre compte de l’évolution du paysage évangélique français, le Conseil National des Évangéliques de France (CNEF) publie ces jours-ci un livret statistique et cartographique. Ce dernier est l’œuvre de Daniel Liechti qui actualise régulièrement ses données compilées depuis maintenant de nombreuses années. Ainsi l’annuaire évangélique publié conjointement par le Réseau FEF et le CNEF comprend traditionnellement un cahier central cartographique et statistique. Durant ma thèse, Daniel Liechti partagea avec moi un savoir incomparable en matière d’évolution du paysage évangélique français.

Ce faisant, le CNEF s’inscrit d’une certaine manière dans la lignée de la sociologie pastorale française: dès les années 1940 le sociologue Gabriel Le Bras proposait ainsi un programme statistique et cartographique ambitieux visant à mieux appréhender la situation du catholicisme français.

Je souligne que ce type de « comptabilité pastorale » n’est pas dénuée d’une portée missionnaire. Le livret possède ainsi une fonction externe (faire connaître aux autorités et au grand public les réalités évangéliques contemporaines) et interne (la dynamique positive permet de mobiliser les troupes et rendre compte des fruits issus des efforts communs.

Quelques commentaires rapides:

  • Tout d’abord, les non initiés au milieu protestant seront étonnés de constater l’existence d’autant de « dénominations » et de familles d’Églises: ainsi, le document fait état de pas moins de 45 « unions ou groupements » et d’Églises indépendantes. Autant dire que parler des évangéliques comme un groupe homogène serait malvenu et un tel fractionnement rappelle la traditionnelle « scissiparité protestante » admirablement bien analysée par Jean-Paul Willaime dans La Précarité protestante. Je souligne que ces « unions » d’Églises sont en évolution constante et témoignent bien du  dynamisme institutionnel actuel. Par exemple, des groupements comme la CEAF (Communauté des Églises d’Expressions Africaines de France) et l’ECOC (Entente et Coordination des Œuvres Chrétiennes) ont un peu plus de 20 ans. On retrouve d’ailleurs l’ECOC dans la liste des « 10 plus grands groupements ou unions »: elle revendique ainsi 69 Églises locales.
  • Toujours à propos de la carte montrant la répartition des Églises affiliées à l’ECOC: la concentration dans la région parisienne est remarquable. Il se trouve que le nom initial de l’ECOC était Entente Congolaise des Œuvres Chrétiennes. Les Églises membres sont donc pour l’essentiel d' »expression » (j’emploie ce terme dans le but de ne pas ramener ces Églises à une seule identité ethnique) congolaise. L’immigration congolaise étant majoritairement concentrée dans la région Ile de France, cela a des donc des conséquences sur la répartition géographique des assemblées locales. D’une façon plus générale, je crois que des recherches distinguant un évangélisme rural d’un évangélisme urbain serait sans doute pertinent.
  • La carte de la page 3 fait apparaître les départements se partageant les extrêmes: les mieux dotés et les moins bien dotés en termes d’Églises. Si la Seine-saint-Denis apparaît largement en tête, c’est dû au fait de la forte progression des communautés issues de l’immigration. En 2010, lors de la rédaction de ma thèse de doctorat, l’ECOC possédait plus de 70 assemblées locales, dont 61 en Ile de France et 32 dans le seul département de Seine-saint-Denis. Mais attention de ne pas limiter la dynamique évangélique aux seules communautés issues de l’immigration, cela ne ferait qu’entériner l’idée selon laquelle la pratique religieuse serait le seul fait des immigrants, ces derniers trouvant dans la pratique religieuse une sorte de compensation à un déficit d’intégration. La réalité est infiniment plus nuancée.
  • Enfin, on remarque la permanence historique du poids des régions de tradition protestante, comme la vallée du Rhône, les Cévennes et le pourtour méditerranéen, mais également l’Alsace.

Une réflexion au sujet de « Livret statistique du Conseil National des Évangéliques de France »

  1. A titre personnel, je conteste les conclusions de cette étude. Si l’on fait une simple division nombre de participants / lieux de culte répertoriés = 460.000 évangéliques / 2112 lieux de culte = 217 personnes en moyenne par lieu de culte ! C’est tout simplement faux. La moyenne est plus proche de 60 personnes par lieu de culte, ce qui nous donne une cartographie réaliste entres les groupes de moins de 60 personnes et les églises de plus de 60 personnes. La réalité serait donc 2112 lieux de culte x 60 personnes = 126.720 personnes. La méthodologie de M Daniel Liechti est fortement discutable face aux preuves.

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