« Heaven is for real »: une géographie de l’au-delà

L’actualité cinéma de ces derniers jours m’offre l’occasion de reprendre un brouillon qui date de près de 3 ans. En octobre 2011, les pages littérature du Globe and Mail (quotidien canadien anglophone) indiquaient que l’ouvrage Heaven is for Real caracolait en tête des ventes dans la catégorie « non fiction » depuis 6 mois. Vendredi dernier, l’adaptation au cinéma de cet ouvrage a été pour lui l’occasion de retrouver le haut du classement (voir la page du New York Times): le New-York Times indique que cela fait 111 semaines que le livre occupe les plus sommets!

Le film est sorti vendredi dernier (voir la bande annonce en anglais ci après) sur le territoire américain. De passage à Montpelier, capitale du Vermont, j’ai pu constater que le cinéma local en faisait une large publicité. Le synopsis, qui s’appuie sur une histoire « vraie », est tout simple: au cours d’une opération chirurgicale, Colton, un jeune garçon de 4 ans, fait ce que l’on qualifie généralement d' »expérience de mort imminente ». À son réveil, il raconte à ses parents (son père est pasteur, détail qui a son importance) ce qu’il a vu. Or, son récit comporte des éléments troublants: il est parle avec précision de son grand père décédé 30 ans avant sa naissance, de la fausse couche de sa mère, sait ce que ses parents étaient en train de faire au cours de son opération. Pour ses parents, cela ne fait aucun doute, Colton a visité le paradis et il partage son expérience avec son entourage.

 

« Géographie des faits religieux »: un dossier à découvrir

carnetsgeogJe vous invite à découvrir le dernier numéro des Carnets de Géographes, consacré à la géographie des faits religieux,  un thème peu étudié par les géographes français, alors même que Pierre Deffontaines avait magistralement ouvert la voie en 1948 avec son ouvrage Géographie et religions.

Outre un texte introductif, « Approches spatiales des faits religieux: jalons épistémologiques et orientations contemporaines« , écrit par Lucine Endelstein et moi-même, vous découvrirez sept articles originaux qui ouvrent, chacun à leur manière, des pistes de réflexions originales sur les approches spatiales des faits religieux. Le tout est en accès libre.

Bonne lecture!

 

« Places of Faith ». Voyage à la découverte de la géographie religieuse américaine

Si vous lisez l’anglais je ne saurais trop vous conseiller la lecture d’un ouvrage cosigné par deux grands noms de la sociologie des religions américaine, Roger Finke et Christopher Scheitle. Intitulé Places of Faith. A road trip across America’s religious landscape, l’ouvrage se présente comme un carnet de voyage des deux auteurs qui ont sillonné en voiture le territoire américain à la rencontre des hauts lieux du fait religieux.

Chaque chapitre est structuré autour d’une ville ou d’un territoire et de ses spécificités religieuses. Le lecteur découvre ainsi tour à tour Memphis, Houston, The Colorado Springs, San Francisco, Salt Lake City, Central Nebaraska (le seul exemple non urbain), Detroit, et enfin New York. Si l’organisation peut sembler simpliste elle offre un confort de lecture certain, chaque chapitre pouvant être lu individuellement. La nature de l’ouvrage conduit les auteurs à mettre l’accent sur les descriptions et ils ont à cœur de donner à voir le foisonnement religieux disséminé sur l’ensemble du territoire américain. Plus un ouvrage permettant de découvrir la vitalité religieuse états-unienne qu’une analyse sociologique plus classique, nous retrouvons néanmoins certains éléments qui structurent les travaux des deux auteurs, notamment l’idée de Finke que l’existence d’un marché religieux ouvert et compétitif favorise les dynamiques religieuses et la diversité de l’offre.

Signalons que la version numérique de l’ouvrage permet de profiter en couleur des très nombreuses illustrations.

Référence:  Christopher Scheitle and Roger Finke, Places of Faith. A road trip across America’s religious landscape, 2012, Oxford University Press.

Pierre Deffontaines et la religion dans « Les Cahiers de Géographie du Québec »

indexVous trouverez dans le dernier numéro de l’excellente revue Les Cahiers de géographie du Québec, un article – « Pierre Deffontaines, géographe de la « noosphère ». Une lecture de Géographie et religions » – qui porte sur les rapports complexes que le géographe Pierre Deffontaines entretient avec le déterminisme géographique et l’École française de géographie. Ce texte est issu en partie de la partie épistémologique de ma thèse de doctorat et, pour une fois, il n’y est pas question d’évangélique.

Vous trouverez ci dessous le résumé de cet article.

« La publication en 1948 de Géographie et religions par Pierre Deffontaines témoigne de l’intérêt nouveau des géographes pour le fait religieux. L’auteur présente son ouvrage comme la description minutieuse et exhaustive des marqueurs du religieux dans le paysage. Notre article montre que, à rebours du caractère descriptif du développement, les pages introductives et conclusives sont l’occasion pour l’auteur de revisiter le thème du déterminisme naturel en opérant un renversement original par rapport à la perspective classique. À un second niveau, Pierre Deffontaines propose en filigrane une définition personnelle de la géographie qui s’appuie sur des auteurs inattendus sous la plume d’un géographe, à savoir le Jésuite Pierre Teilhard de Chardin et le philosophe Henri Bergson. La géographie est alors présentée comme une discipline humaniste qui témoigne de l’action de la pensée dans la matière ».

« L’Église et la ville. Le diocèse de Lyon à l’épreuve de l’urbanisation (1954-1975) », Olivier Chatelan

Chatelan

Dans le second volume de ses Études de sociologie religieuse, Gabriel Le Bras – un des pères de la sociologie religieuse en France (Willaime et Hervieu-Léger, 2001) – écrivait ces lignes restées fameuses : « Et enfin, je dirai en troisième lieu que l’attraction des villes a une influence ruineuse sur la religion des ruraux (…) Je suis pour ma part convaincu que, sur cent ruraux qui s’établissent à Paris, il y en a à peu près quatre-vingt-dix qui, au sortir de  la gare Montparnasse cessent d’être des pratiquants » (Le Bras, 1956 : 480).

Gabriel Le Bras mettait ainsi en avant le lien entre la sécularisation de la société française et l’urbanisation croissante du territoire. Un tel propos souligne combien la ville industrielle a constitué un défi pour le catholicisme, contraint de s’ajuster à des réalités inédites, et à des changements rapides. L’ouvrage d’Olivier Chatelan interroge avec précision l’attitude des responsables catholiques lyonnais entre les années 1950 et 1970, une période au cours de laquelle les métropoles françaises ont connu des mutations décisives : pensons seulement à la construction des grands ensembles ou encore à la politique des « villes nouvelles ». Lire la suite

L’Apocalypse et le géographe

Les amateurs de science-fiction savent que l’un des thèmes favoris de ce genre littéraire est la destruction de l’humanité et de la Terre. Nombre de romans sont ainsi des récits apocalyptiques qui mettent en scène les différentes phases de la destruction finale. Le terme d' »Apocalypse » semble adéquat dans la mesure où le texte biblique constitue la référence centrale de la plupart des romans de science fiction occidentaux. Ainsi, derrière des récits apparemment peu sérieux, peuvent se cacher de véritables « méditations métaphysiques » sur la condition humaine au moment où sa disparition devient une hypothèse envisageable.

Dans son dernier ouvrage, Le syndrome de Babylone. Géofictions de l’apocalypse, le géographe Alain Musset analyse avec minutie les romans, films et jeux videos qui mettent en scène la fin du monde. Il écrit en introduction: « Même si la proposition est en apparence ludique, analyser les discours  sur l’apocalypse, en particulier dans les récits de science-fiction, permet de mieux comprendre les dysfonctionnements politiques, économiques et sociaux qu’ils révèlent dans un monde perçu comme toujours plus vulnérable malgré (ou à cause) son développement technologique » (p. 23). Alain Musset s’était déjà essayé à  ce type d’exercice dans De New-York à Coruscant. Essai de géofiction, ouvrage dans lequel il montrait en quoi la capitale de l’Empire intergalactique dans la saga Star Wars nous renseignait sur notre propre condition urbaine.

Vous pouvez entendre Alain Musset parler de son livre dans l’émission de géographie Planète terre, sur France Culture.

Et pour ceux qui veulent croiser science-fiction et monde évangélique je recommande chaudement la saga Left Behind qui comprend une quinzaine de romans. Il s’agit d’une mise en récit de l’Apocalypse, avec la lutte de la « Tribulation force » contre l’Antéchrist, l’inquiétant Nicolae Carpatia. Plus que de science-fiction on peut parler de véritable « fiction prophétique ». Le génie des deux auteurs de cette saga est de faire d’un exposé de la théologie dispentionaliste des ouvrages de fiction pour le grand public.

Une histoire des Protestants en France: une publication majeure

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A l’occasion de la parution d’un ouvrage important, Histoire des protestants en France (Fayard), l’historien Patrick Cabanel était l’invité de l’émission de France Inter « La marche de l’histoire », qu’avec le décalage horaire j’écoute pendant le petit déjeuner. Il y fut question des Protestants du Languedoc. L’émission peut être écoutée ICI.

Je tiens d’autant plus à souligner le travail exigeant de Patrick Cabanel qu’il a été très injustement pris à partie par le journaliste évangélique Paul Ohlott sur son site Actu-chretienne. Que ce dernier règle ses comptes avec ce qu’il appelle la « la vieille soupe religieuse luthéro-réformée », c’est son droit le plus strict, mais qu’il en vienne à offrir une interprétation erronée d’un travail de chercheur dans le but de servir une démonstration fallacieuse, c’est aller un peu loin.

Et Dieu sous-traita le Salut au marché…

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J’attire l’attention sur une publication récente de Patrick Michel et Jesús García-Ruiz: Et Dieu sous-traita le Salut au marché: de l’action politique des mouvements évangéliques en Amérique Latine. Les éditions Armand Colin ont tout de même réussi l’exploit de se tromper dans le titre sur leur site internet en utilisant le terme « évangélistes » et non « évangéliques ».

Je reviendrai probablement dessus dès que je l’aurai reçu (et surtout lu). Je suis assez curieux de voir comment les auteurs justifient l’usage du terme « évangéliques » dans le titre pour traiter du « néo-pentecôtisme », terme utilisé pour désigner les mouvements de la « troisième vague » (voir cette note très claire sur le blog de Sébastien Fath). Ce type de périodisation pose trois problèmes:

  • il correspond à un découpage a posteriori qui peut donner l’impression d’une sorte de mouvement de l’histoire vers un but précis.
  • quel terme utilisera-t-on par la suite: « néo-néo-pentecôtisme », « post-néo-pentecôtisme »?
  • il établit des ruptures et des discontinuités, là où il faudrait sans doute voir des effets de continuité dans le temps long.
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Une instrumentalisation politique et identitaire de la laïcité en France?

Je vous invite à découvrir une capsule de recherche que j’ai rédigée pour le site internet du Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM). Intitulée « La laïcité falsifiée :peut-on parler d’une instrumentalisation politique et identitaire de la laïcité en France?« , cette capsule fait la synthèse d’une conférence de Jean Baubérot à Montréal  à l’occasion de la publication de son livre La laïcité falsifiée auquel j’avais consacré une note. Pour l’occasion, Daniel Weinstock avait pris le rôle du discutant.